29 avr. 2020

Chevauche-brumes, tome 1




Les aventures d'une troupe de mercenaires, les lansquenets, qui au sortir d'une énième bataille se voient missionner par leur suzerain pour enquêter sur un phénomène magique appelé la Brume d'encre. Cet orage qui, telle une montagne, bouche l'horizon à la frontière nordique, a fait naître en effet des créatures monstrueuses menaçant la sécurité de l'Etat.



Pourquoi ce livre ? Je l’ai remarqué à sa sortie mais ce sont ses sélections dans certains prix de la littérature de l’imaginaire qui m’a fait sauter le pas dans l’achat de ce qui s’avère être un premier tome.

Chevauche-brumes est un récit haletant où on ne perd pas le temps en narration superflue. Notre attention, et celui des soldats, est centrée sur la menace de la brume et des créatures cauchemardesques qui s’y planquent. Celle-ci se meut, se rapproche, et la tension comme la crainte deviennent palpables.
Ce premier tome se veut entièrement plongé dans l’action. Pas de diplomatie, très peu de politique, juste ce qu’il faut pour savoir que nous évoluons dans un royaume dirigé par un régent, sa Majesté n’étant encore qu’un jeune enfant aux réflexions pourtant très matures. le décor se plante davantage vers un petit village que la brume est proche d’avaler, et des soldats qui luttent avec rage pour repousser les vagues de monstres.
Je dois dire que malgré quelques défauts, le livre se dévore très, très vite. La maquette aérée et agréable et le style à la fois léger et soutenu, avec des phrases bien tournées, de Thibaud Latil-Nicolas permettent à l’esprit de lire et lire encore sans éprouver ni fatigue ni ennui. Toutefois cet excellent point vient ternir un deuxième. Si on lit le livre en quelques heures, on a également l’impression que l’intrigue est vite expédiée sur la question de la temporalité : peu de connecteurs guident la durée de certaines choses qui me paraissent essentielles, comme celle du voyage entre le village menacé et la capitale du royaume. De fait, si on comprend implicitement que plusieurs semaines se sont écoulées, rien n’est clairement annoncé, en dehors d’une allusion vers la fin de l’ouvrage et je dois dire que cela m’a perturbé à plusieurs reprises. Retenez néanmoins que ce problème de repère est bien le seul point noir qui vient ternir le tableau, ce qui me paraît bien dérisoire compte tenu de la puissance du récit.
La fin vient donc très vite et je dois dire que, si elle n’est pas totalement une surprise, certains rebondissements m’ont ravie par leur ingéniosité et l’épilogue m’a parue des plus plaisants, à tel point que je me suis dit que le second tome ferait partie de mes achats post-confinement.

L’autre grande force du récit vient de la plume conjuguée aux personnages. Ceux-ci sont peu nombreux contrairement aux autres récits de guerre et d’épopée. C’est une petite compagnie que nous sommes amenés à suivre, une compagnie divisée puisqu’une partie suit le nouveau capitaine, qui doit porter un message urgent au régent. De fait, on se disperse entre la ville assiégée et la capitale, offrant deux perspectives différentes et permettant de lire avidement. Ainsi on oscille entre différentes émotions dont la plus puissante reste bien entendu la crainte de perdre certains personnages, parce qu’on s’attache très facilement tellement ils nous semblent humains dans leurs craintes, leur mesquinerie et leurs petites joies. Très vite, j’ai retenu le nom et les aptitudes de chacun, preuve s’il en faut de mon affection pour la plupart d’entre eux. En plus de cela, les doryactes - qu’on peut assimiler plus ou moins à des amazones de l’Antiquité - viennent ajouter de la pluralité aux forces armées qui composent cet univers, et les caractères différents font un bien fou à l’ensemble.

A noter que les différentes formes de magie sont bien foutues grâce à leurs limites et à leur nombre restreint : seulement trois formes, ce qui permet de les assimiler facilement sans ressentir de flottement. Finalement peu utilisées, elles sont un point essentiel dans la résolution, permettant de dire que cela fait partie intégrante de l’univers.

Comme je l’affirmais précédemment, les personnages sont puissants par leur humanité. Ils ont tous ce petit quelque chose qui les rend sympathiques, parfois un éclat de colère justifié ou une boutade bien placée. Seul un événement a légèrement altéré mon attachement mais ce fut vite oublié dans les affres de la bataille. J’ai particulièrement apprécié Murtion et Lansade pour leur sens de la camaraderie et du devoir, leur gentillesse aussi. Saléon m’a en revanche paru plus autoritaire, il le faut bien vu son grade, ce qui ne le rend pas totalement antipathique mais difficilement sympathique. Enfin, j’ai apprécié l’ensemble des doryactes pour leur personnalité mordante.



Les différents ingrédients ne sont pas forcément originaux : une compagnie de soldats qui doit unir ses forces dans l’espoir d’annihiler un mal à la source inconnue et aux faiblesses limitées n’a rien de novateur. Ce sont les alliages entre les personnages, la plume affinée et immersive et une fin sous tension qui rendent ce livre mémorable. Lu en quelques heures, on se régale de cette équipée dans un décor cauchemardesque et on se plaint finalement que ce soit trop court. En tout cas, j’en redemande volontiers !



17/20





Les autres titres de la saga :
1. Chevauche-brumes
2. Les Flots sombres
- saga en cours -


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