27 nov. 2019

Passing strange




San Francisco, 1940. Six femmes, avocate, artiste ou scientifique, choisissent d’assumer librement leurs vies et leur homosexualité dans une société dominée par les hommes. Elles essayent de faire plier la ville des brumes par la force de leurs désirs… ou par celle de l’ori-kami. Mais en science comme en magie, il y a toujours un prix à payer quand la réalité reprend ses droits.



Un grand merci aux éditions ActuSF pour ce partenariat.

Pourquoi ce livre ? Le résumé promettait une magie orientale, pour ne pas dire asiatique, qui m'intriguait, je n'ai donc pas hésité à le demander, me doutant qu'il remporterait un petit succès.

Passing strange rapporte l'histoire de femmes différentes des normes sociétales des années 20 ou 30 aux États-Unis, plus précisément en Californie. Mais tout commence bien plus tard, alors qu'une vieille dame d'environ cent ans vend la dernière oeuvre de Haskel à un marchand de magasines pulp. Que représente-t-elle ? Pourquoi la vend-elle maintenant, la veille de sa mort ? Et, surtout, pourquoi le marchand semble si bouleversé par cette oeuvre ? C'est ce que cette plongée dans le passé va nous révéler.

La quatrième de couverture indique qu'on va suivre six femmes, mais trois sont réellement présentes. Haskel la dessinatrice, Emily la chanteuse de bar et Hélène l'avocate. À une époque trouble où la guerre détruit l'Europe, ses femmes mènent un autre combat, pour être reconnues comme indépendantes et, surtout, faire de sa sexualité une liberté individuelle. Le sujet est donc fort et actuel et Ellen Klages peint, à son tour, le tableau d'une société dépassée par ces changements, où la loi et les représentants de l'ordre ont la main mise sur les citoyens.

Pourtant l'ambiance du livre n'est pas uniquement dramatique et violente, les personnages parviennent à créer des moments de bonheur et de complicité, au milieu de leur détresse, qui les rendent attachantes à souhait.
Ma préférence va pour Haskel, cette femme qui attend, ou n'attend plus, son mari. Son véritable talent lui a permis de trouver un équilibre entre indépendance et confort. Le moment où elle révèle son passé m'a ému et j'ai trouvé que son expérience renforçait ses qualités.
Il en va de même pour Hélène, pour qui on ressent toute la détresse de ne pas trouver de clients à défendre dès le début de l'oeuvre, tout ceci à cause de son sexe…
Emily m'a beaucoup moins émue, probablement parce qu'elle possède une part de candeur tranquille qu'ont toutes les personnes qui retombent toujours sur leurs pattes.
Et les autres portraits dressent les fondements de l'amitié sincère, celle qui est capable de croire et d'accepter tout, même ce qui semble le moins réaliste.

Finalement, ma déception vient peut-être de la part fantastique qui tarde à apparaître. En effet, il faut attendre les quarante dernières pages pour découvrir de quoi il en retourne. Si son entrée en scène permet une belle part d'émotions pour cette fin, preuve s'il en faut qu'on s'attache à ces bouts de femmes, j'ai été frustrée qu'elle tarde tant à intervenir.
En revanche, une fois qu'elle apparaît, je me suis régalée car la magie usitée est toute douce et originale. Elle est également sujette à interprétations au vu du sujet traité, et m'a vraiment permis d'apprécier cette fin par son rebondissement inespéré.

Le style de l'autrice est très directe. Si cela m'a perturbée dans un premier temps, il n'en reste pas moins accessible et promet un moment de détente. Sans s'attarder sur de longues descriptions, Ellen Klages ancre parfaitement l'ambiance de l'époque choisie de sorte à ce qu'on est l'impression d'y être. Certains moments invitent même à écouter quelques musiques !

La nouvelle Cagolane qui prolonge le récit en se focalisant sur Franny, une femme qui aide Haskel et Emily, permet d'en apprendre plus sur cette fameuse magie. Pour les frustrées comme moi, ce fut un petit atout savoureux !
Enfin, l'ensemble est complété par une interview de l'autrice, menée par Jean-Laurent Del Socorro et traduite par Eric Holstein. Ce fut sympathique d'en apprendre plus sur elle, et j'aime d'autant plus que la maison d'édition partage ce petit moment pour compléter la lecture.



Je suis partagée entre le plaisir de ma lecture et la frustration. Plaisir, car il est indéniable que je me suis attachée aux personnages tout comme j'ai su apprécier l'ambiance. Frustration, car le résumé promet de la magie, du moins du surnaturel qui tarde à apparaître. Mais une fois là, une certaine poésie se développe, l'émotion est de retour et j'ai pu savourer jusqu'à la fin.


 

14/20




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