Pas plus que sa jeune acolyte, le
profileur Brolin ne pense que les serial killers reviennent d'outre-tombe.
Fût-il le bourreau de Portland qui étouffait et vitriolait ses victimes avant
de les découper. Mais le bourreau est mort et le carnage se poursuit. Le
nouveau tueur agit-il seul ou fait-il partie d'une secte? Pure sauvagerie ou
magie noire ?
Brolin a peur. Cette affaire dépasse tout ce qu'on lui
a enseigné. S'immerger complètement dans la psychologie d'un monstre, le
comprendre afin de prévoir ses crimes, devenir son double, tels sont les
moindres risques de son métier. Peut-on impunément prêter son âme au mal ?
Mon
avis :
Lu dans le cadre du challenge
Choisir la prochaine lecture de sa PAL, c’est la première fois que j’ai tenté
une lecture de Maxime Chattam, malgré le nombre important de titres que je
possède de lui. J’avais un peu peur de me lancer, puisque j’en entends beaucoup
de bien et j’avais peur que la magie n’opère pas sur moi, mais je dois
reconnaître que je me suis laissée porter sur la vague d’un plaisir paradoxal,
au vu du contenu de ce thriller.
Bien que ce genre ne soit pas
tellement ma prédilection, j’ai tout de même eu l’impression de lire un
prologue quelconque, commun à ce genre d’œuvres. En effet, dés les premières
pages, le lecteur fait face à un type de mal inhérent dans notre société et, si
cela réveille notre dégoût, on ne peut pas dire que nous soyons vraiment
touchés, contrairement à ce qui suivra ensuite. Il faut toutefois ajouter que
ce prologue, quoiqu’il n’ait pas son importance en début d’œuvre, gagne un sens
à la fin de l’enquête, en nous divulguant là encore au passage son lot d’horreur.
L’intrigue en elle-même sera
vraiment éprouvante à lire. Le mal à l’état pur est mis en scène dans une
intrigue haletante, prenante, où les énigmes et les indices obtenus au compte
goutte chassent l’ennui comme un sourire chasserait des nuages. On vit l’enquête,
on prend part à elle, on cherche autant que les forces de l’ordre le coupable
parmi les suspects, allant même jusqu’à (pour ma part) conjecturer des
hypothèses les plus farfelues pour mettre un nom sur la violence des crimes
commis.
Comme je l’ai rapidement fait remarquer,
les indices sont extrêmement minces, parfois inexistants, ce qui ralentit
considérablement l’enquête et permet d’offrir un côté réaliste à cette
dernière. En effet, trop souvent j’ai lu des policiers où les indices
affluaient sans pour autant que les inspecteurs mettent en évidence un lien.
Or, Maxime Chattam nous offre là un tableau plus commun des enquêtes policières
liées à des serial killers naissants.
L’intrigue s’alterne parfois sur des
personnages. En effet, parfois le point de vue se focalise sur Juliette, jeune
étudiante en psychologie liée à un premier serial killer, souvent se
focalise-t-il sur Joshua, profileur de trente ans qui compromettra son avenir
au FBI dans cette enquête pour boucler le coupable. Je souhaite surtout m’arrêter
sur cette alternance de profils qui permet un changement dans le rythme de l’intrigue,
faisant ressortir le calme avant la tempête ou encore une intensification du
suspens, de la tension. Et comme j’ai déjà pu le faire comprendre, on ne
résiste pas à cette manipulation du narrateur.
Bien sûr, c’est la fin qui gagne en
intensité, entre des personnages qui se jettent dans la gueule du loup ou d’autres
qui essayent de s’en échapper par tous les moyens. On a peur pour certains, on
craint la réaction de d’autres, mais jamais on reste indifférent dans cette infernale
horreur que nous dépeint Maxime Chattam. Et la toute fin, les tous derniers
mots nous offrent toute l’horreur de la situation, enjoignant le lecteur à se
procurer la suite sans attendre pour en apprendre plus sur la dernière révélation.
Je souhaite en particulier m’arrêter
sur une petite idylle qui se crée en certains personnages. Certes, dans un
monde de violence, les sentiments adoucissent les mœurs mais je trouve que cela
devient un topos dans le thriller et j’aurai voulu que l’auteur s’en abstienne,
même s’il maîtrise le développement de cette relation de manière tout à fait
convenable.
Les personnages nous sont présentés
progressivement, chacun leur tour dans le milieu.
En premier lieu apparaît Joshua
Brolin, inspecteur de police âgé de la trentaine et destiné à une carrière
prometteuse au sein du FBI. On s’attache très rapidement à lui, surtout lorsqu’on
sait qu’il a besoin de jeux vidéos pour évacuer la tension du travail. Cela le
rend humain, presque gamin et on est pris de compassion pour lui.
En parallèle se découvre Juliette,
étudiante en psychologie et victime d’une mauvaise rencontre sur le net. Son
comportement et ses connaissances en font une personne très déterminée, douée d’un
esprit solidaire et, on ne peut le nier, casse-cou. Les multiples épreuves qu’elle
devra traverser la rendront attachante, et là aussi le lecteur est pris de
compassion, et à la fin d’un maigre espoir, pour elle.
Autour d’eux s’englobent un
foisonnement des personnages, comme à la police ou dans les contacts de
Juliette, qui développent le réalisme de l’intrigue et complexifient légèrement
la trame de l’histoire.
De manière plus paradoxale, l’ennemi est attachant à
sa façon (et là, on se demande si je ne suis finalement pas un serial
killer, moi aussi ! XD). Rejetant toute idée reçue sur les meurtriers
répondant simplement à des pulsions maléfiques, le tueur nous apparaît ici
comme quelqu’un de très évolué, capable d’une maîtrise littéraire et de
conjectures, certes ignobles, mais qui n’en restent pas moins véridiques pour
certains de notre monde. Mais là, je pars un peu loin dans mes idées, je
voulais surtout dire que, étant capable de penser aussi clairement qu’un humain
dit normal, l’auteur place le coupable sur un pied d’égalité avec les lecteurs
puisqu’on est tous capables de penser ainsi, si bien que cela amène quelques
petites rétrospections sur soi (si vous n’avez pas compris mon idée, je ne vous
en tiendrais pas rigueur, j’ai moi-même eu du mal à la relecture).
Le style est maîtrisé, alliant
platitude du quotidien et tension de l’enquête, on se laisse porter sur ces
alternances de rythme. Le vocabulaire, sans être trop soutenu, contribue à
donner l’impression d’une grande maîtrise et d’une connaissance technique
appréciable.
J’ai grandement apprécié les allusions à certains
textes littéraires célèbres ou plus obscurs, cela montre déjà l’abondance des
connaissances de l’auteur dans son domaine mais aussi une manière de les
exploiter qui apporte une force considérable à son intrigue et resserre les
ficelles autour de celle-ci.
De plus, alors que l’auteur nous
partage dans une sorte de préface son important travail de recherches sur les
institutions de la criminologie américaine ou les termes plus scientifiques
liés aux études des indices, toutes ces recherches apportent vraiment du
positif au récit car cela procure une maîtrise exceptionnelle et un effet très
réaliste, qui permet une meilleure attache encore à l’ensemble de l’œuvre.
En
conclusion, un thriller haletant où le mal s’incarne de plusieurs façons.
La qualité et l’abandon des personnages face aux péripéties qu’ils doivent
subir et l’intensification du rythme jusqu’à la fin entraînent un profond
attachement à l’ensemble de l’œuvre. Vif, piquant, violent, une chose est sûre :
on ne reste pas indifférents et la fin est une invitation à se procurer la
suite. Résultat de cette lecture, j’ai une forte envie de lire le second tome. « Pire
encore », je suis curieuse de me perdre dans d’autres univers de Maxime
Chattam.
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