Johann von Capriccio est un jeune étudiant en obstétrique et ciroplaste de talent à l'université de Schattengau, ville fondée par le savant-astrologue Mirabile. Les mannequins anatomiques de Johann attirent un jour l’attention de Catherine von Grunewald, femme du margrave. Celle-ci le fait convoquer afin de lui montrer l’enfant dont elle a accouché quelques mois auparavant dans le plus grand secret. Corne, queue, sabots de bouc : l’enfant présente toutes les caractéristiques d'un faune.
En compagnie d'une mercenaire et de l'héritière de Mirabile, Johann va tenter de comprendre les mystères de Schattengau, ville nichée au cœur des Alpes, dont l’université attire les esprits les plus brillants, tandis que les puissants de l’Empire germanique se pressent dans le palais du margrave Von Grunewald. Depuis cinq cents ans, c'est un haut-lieu du savoir. Étudiants et habitants la font vivre sous le patronage des grotesques, statues de pierre représentant des créatures des folklores européens, sculptées par le fondateur de cette ville où l'art et la science prennent vie à l'insu des habitants.
Pourquoi ce livre ? On ne présente plus Guillaume Chamanadjian, décrit comme une voix émergente de la fantasy francophone des dernières années. Co-auteur de la fameuse double trilogie La Tour de Garde, il s’illustre seul dans ce one shot. C’est à l’occasion du Prix Livraddict que ce roman sort de ma PAL.
J’adore le titre, cette idée de mouvement dédiée à quelque chose de mystérieux. Qu’est-ce que les grotesques ? On met du temps à comprendre ce que cela symbolise, ce que cela implique dans l'intrigue.
En toute honnêteté, j’ai bien aimé Une valse pour les grotesques mais je ne peux m'empêcher d'être déçue. Pourtant j’ai adoré le prologue. Il prend à contre-pied ce qui le suit, en injectant la musique qui nous enverra valser par la suite. J’ai beaucoup aimé le point de vue narratif, qui apporte émotion et qui épaissit le mystère.
D’ailleurs, j’ai également apprécié le premier chapitre, très porté dans le médical, avec des termes spécifiques et des scènes très visuelles. J’imaginais parfaitement le travail de précision de Johann, sans jamais plonger dans le dégoût ou le malaise - je suis devenue sensible aux scènes de sang.
Malheureusement, les ressorts narratifs me paraissent inférieurs à ceux de la première trilogie - ce qui peut paraître logique puisque l’intrigue est plus condensée.
Par ailleurs, le rythme est bien trop rapide, que ce soit dans la chronologie des évènements, qui se déroulent sur quelques jours à peine, ou dans la narration, dans laquelle on ne se pose jamais. De fait, tout est un peu mélangé et ce qui doit paraître comme des révélations primordiales ou des petits secrets sans incidence sont disposés sur un même degré d'importance. Forcément, cela me laisse un peu sur le carreau, ne parvenant pas à apprécier chaque élément à sa juste valeur.
De fait, avec un rythme aussi dense, l’attachement envers les personnages est complexe. Par exemple, je n’ai rien ressenti pour Johann, si ce n’est une vague compassion de le voir ainsi ballotté contre vents et marées. Il en va de même pour Renata, pour qui on ne sait pas si la fortune lui sourit ou non… Seul le duo formé par Lukas et Ombeline m’a beaucoup plu, pour cette aura de mystère et d'assurance tranquille qu'ils dégagent tous deux.
En dépit des problèmes de rythme et de l’avalanche d’informations, l’ensemble est plutôt bien ficelé. J’ai pris plaisir à découvrir les spécificités de Schattengau, même si j’ai perdu pied face aux éléments qui ancrent le récit dans une réalité proche de la nôtre. Je ne m’y étais pas préparée, alors même que le résumé semait des indices - bien la preuve que je relis rarement la quatrième de couverture avant d’attaquer un roman.
De même, le système de magie est plutôt original, d'autant plus que l’auteur laisse planer le doute quant à sa nature. Il s'implante parfaitement dans le récit, de sorte que cela fasse naturel, comme si c'était ordinaire.
J’ai passé un bon moment de lecture à Schattengau, entourée d’une magie douce et de personnages étonnants, bien que peu attachants. L’intrigue repose sur une imbrication du présent et du passé qui apporte suspens et mystère. Je ne peux cependant m'empêcher d'être déçue car je n’ai pas retrouvé la puissance de Capitale du Sud. Peu importe, cela reste une bonne lecture.
14/20
Une valse pour les grotesques de Guillaume Chamanadjian, Aux forges de Vulcain, 440 p.
Couverture par Elena Vieillard





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