20 avr. 2016

Un étranger en Olondre





      Jevick est le fils du plus riche marchand de poivre de l’Archipel du Thé. Bercé toute sa vie par les légendes et les contes de la lointaine Olondre, un pays où les livres sont aussi communs qu’ils sont rares sur son île, il touche enfin, à la mort de son père, au bonheur de visiter cette contrée magique et remplie de bilbiothèques afin d’y perpétuer le commerce familial.
Ses désirs semblent comblés jusqu’à ce que, au lendemaindu rabelaisien Festival des Oiseaux, qui rythme la vie religieuse en Olondre il se découvre hanté par un ange.








           Je tiens tout d’abord à remercier Patrick Dechesne des Editions de l’Instant pour ce partenariat que je recommande à tous les amoureux d’une Fantasy épurée.

       Et avant de commencer la chronique en elle-même, je souhaiterai souligner la qualité de l’objet, avec un papier épais (et par conséquent lourd) et une mise en page vraiment excellente. Cela fait longtemps que je n’avais croisé la route d’un ouvrage aussi bien fini et je me devais de faire remarquer cette première impression à la réception du livre.
       Dans la même lignée que ce premier commentaire, l’illustration est en parfaite adéquation avec l’intrigue. Route mêlant les couleurs sombres et pastelles, c’est tout à fait représentatif de l’intrigue générale.

       Parlons-en, de cette intrigue ! Toute en finesse et en douceur, elle aura le don de dérouter les lecteurs. Sur un livre comptant un certain nombre de pages (le pavé frôle les cinq cents pages), le lecteur est en droit de s’attendre à un minimum d’action pour rythmer la lecture. Or, ce récit nous livre davantage la quête initiatique d’un jeune chef de famille assoiffé de découvertes dans un ailleurs inconnu, le tout légèrement plongé dans une dimension mystique qui ravira les adeptes de la Fantasy.
       Je pense que la force et la faiblesse de cette œuvre réside en un seul point : ce manque d’actions. Certes, Un étranger en Olondre enclenche un renouvellement des codes de la Fantasy, qu’ils concernent l’intrigue ou les personnages. Or cette absence de rythme, si elle permet de faire ressortir la poésie des mots et la beauté d’un monde étranger, elle laisse également entrevoir quelques longueurs mal venues, et j’avoue avoir peiné quelques petits temps.
       Il m’est pourtant impossible de dire que je n’ai pas apprécié ce livre. Enfin, il est très difficile de faire comprendre ce que j’ai ressenti, et c’est assez paradoxal au final... J’ai adoré cette œuvre pour sa légèreté et ses quelques moments de lourdeur, pour sa poésie et ses idées. Car oui, ce livre engage dans le même temps des réflexions sur la théologie mais aussi autour de l’essence des manuscrits, leur beauté et leur rareté qui les rend tout aussi précieux et passionnant, à l’image de l’ouvrage qu’on tient dans les mains.

       Un gros point positif dans l’intrigue réside également dans l’enchâssement des petites histoires, un effet de narration qui disparaît progressivement de la littérature de l’imaginaire contemporaine. Ici, j’ai eu l’impression de me retrouver dans Don Quichotte (l’histoire n’a rien à voir, on est d’accord), pour vous dire à quel point ces enchâssements sont bien présents et donnent du poids à l’ensemble.
       Difficile de parler de la fin sans trop en révéler, chose que je tiens absolument à éviter ! Je dirais donc que je l’ai trouvé à la fois magnifique et cruelle, à l’image de la quête initiatique de Jevick tout au long de son parcours.

       En ce qui concerne les personnages, on ne peut qu’être séduit par le tempérament de Jevick, le protagoniste qui a répondu à l’appel de l’inconnu. Courageux voire téméraire, honnête, fidèle, solidaire, malgré les dures épreuves qu’il sera amené à traverser les qualificatifs élogieux ne manquent pas pour le décrire, lui et sa personnalité si complexe et si attachante. Il n’abandonnera jamais malgré le poids du fardeau qui repose sur ses épaules, renouvelant de ce fait les qualités des Héros comme on les perçoit dans les épopées mythiques (les faits d’armes en moins !).
       Il est amené à côtoyer une multitude de visages au cours de son périple, mais la figure la plus mythique reste encore Jissavet, à la cruauté et surtout l’amertume sans borne. Elle surprend par son comportement et sa maturité malgré son âge. Et pourtant, malgré sa rudesse on se surprend à l’apprécier, rendant certains passages plus cruels encore…
      
       Quant à la plume, vous avez sûrement dû le comprendre auparavant mais elle dégage une grande force dans le choix de son lexique, très précis et soutenu, accentuant la difficulté à s’acclimater à cette œuvre. Mais ne vous y trompez pas, la poésie et la sonorité des mots adoucissent les angles et finalement on se laisse couler sur la richesse que renferme ce livre.

       En conclusion, ne laissez pas un mauvais avis se former devant ma maladresse à exprimer ce que j’ai pu ressentir à cette lecture, car c’est vraiment un livre unique par la qualité de sa plume autant que par l’expérience riche que dégage l’intrigue, où seule l’absence d’actions pourrait porter préjudice à un ensemble grandiose. L’auteur en profite pour évoquer tout en finesse des sujets forts comme la théologie ou encore le statut du livre en lui-même. Et la plume, soutenue et sublime, vaut le détour à elle seule ! Alors n’hésitez plus, laissez-vous tenter par une aventure en Olondre.





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