Janvier 1907, l'officier de narine Pierre Loti débarque en Egypte. Pendant quatre mois, l'écrivain-voyageur se promène du Caire à Assouan, des rives du Nil au désert de Libye, de Louxor à Philae, poussé par le désir de capter le visage et l'âme d'un peuple. La mort de Philae, c'est la chronique d'un observateur hasardé dans l'Egypte du début du XXe siècle ; le brûlot d'un polémiste qui porte la plume dans la plaie d'un pays balafré par l'occupation britannique ; le livre d'un écrivain dont le style s'enchante au contact d'une civilisation avec laquelle il se sent de mèche. De la polémique et de la poésie : voilà avec quels ingrédients Loti a concocté cet ouvrage qui constitue le meilleur guide pour tous les voyageurs soucieux, comme lui, de s'aventurer au pays des pharaons.
Lu dans le cadre de mes études universitaires, je dois dire que cette lecture fut une vive surprise, malheureusement pas si agréable que je l’aurai souhaité, pour ne pas dire qu’elle fut totalement détestable.
Avant de dévoiler le point le plus négatif de ce récit, je vais tenter d’éclaircir en quelques mots le but de cette œuvre.
Liée à la culture orientale qui s’installe à partir de la moitié du XIXe siècle, Pierre Loti nous livre le récit de son voyage en Egypte, et je dis « son » par la présence du « je » dans l’écriture même. De ce fait le lecteur découvre la vision du narrateur alors même que ce dernier découvre les bâtiments ce qui peut entraîner une implication du lecteur, même si cette implication restera fortement et indéniablement passive.
Passive car le récit est majoritairement descriptif. En commençant par le Sphinx, déambulant au Caire avant d’échouer à Philaé (une ville et non pas une figure mythique comme je le croyais) en suivant le cours du Nil, le narrateur n’omet aucun détail sur l’architecture, les coutumes, le quotidien, le… Tout. Il décrit tout, fait de longues entorses au récit pour introduire un infime détail, et cela finit par lasser (et quand je dis lasser, c’est parce que j’ai sorti le premier synonyme qui m’est venu en tête pour remplacer gaver, c’est pour dire).
En petite anecdote, j’avais interrogé mon père s’il connaissait cet auteur ne serait-ce que de nom. Non seulement il connaissait le nom mais également une des œuvres majeures de l’auteur (Le pêcheur d’Islande), il a également su me dire que la plume était descriptive. Le rassurant sur cela, je le félicitai pour sa culture tout en affirmant haut et fort que j’adorais les descriptions. (J’avais simplement omis que je les appréciais quand elles concernaient un univers totalement inventé !) Non, sérieusement, ici, c’est trop de trop. On parcourt le Nil et on se noie dans ce flot de détails parfaitement inutiles et subjectifs. Ce fut une réelle douleur à lire et je ne peux que féliciter celui qui est parvenu à avaler l’ensemble sans sauter ne serait-ce qu’un paragraphe (*ne se félicite pas…*).
La fin a tout de même eu le don de nuancer mon avis en le pimentant d’une note positive (*qui l’eut cru ?*). En réalité, c’est dans le « P.S » du narrateur que l’émotion survient, quand Pierre Loti adresse une vive satire de la société bourgeoise prête à tout pour tirer le moindre profit, même à causer des dommages sur toute une pan de la civilisation occidentale, qu’elle soit antique ou moderne. Une petite claque pour un tel livre laissant totalement indifférent. Si cette note positive (d’un point de vue formel, pas du tout du contenu) a su raviver la flamme de la lectrice engagée, ce fut toutefois bien maigre pour faire passer ce livre au rang de bonnes lectures.
Parmi ces pérégrinations nous rencontrons bien sûr des personnages mais je dois dire que nous passons totalement à côté d’eux en raison des longueurs de description. Quelques dialogues entrecoupent la monotonie de l’ensemble mais les détails quant à l’interlocuteur cassent là encore la nouveauté et le lecteur est à nouveau entraîné dans la gangue descriptive.
Quant à la plume, elle reste accessible à tout lecteur confirmé, ce qui est là encore une bonne surprise vis-à-vis de ce récit datant du début du XXe siècle. J’appréhendais un style lourd et haché, ce fut finalement limpide. Je n’irai pas jusqu’à affirmer qu’on parcourt une fluidité exemplaire, mais j’admets que ce fut moins retors que prévu.
Cela aurait pu être une lecture intéressante dans le rapport du contenu, avec la vision d’une Egypte dominée par le monde occidental. Malheureusement, l’ensemble est noyé dans un flot descriptif et il ne subsiste de ce naufrage la dernière satire du texte, contenue dans le post-scriptum. Lire un roman de deux cent pages pour un seul paragraphe intéressant, le dernier, ça pique…
07/20
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