27 févr. 2024

Au coeur de la solitude




1867, une scierie tourne à plein régime dans un bruit effroyable quand soudain, des ouvriers courent secourir un homme à terre. Il s'est blessé gravement aux yeux. John Muir a déjà 29 ans et il est confiné dans une chambre obscure : il est probable qu'il restera aveugle. Mais miraculeusement, après des mois d'une convalescence quasi mystique, il recouvre la vue. C'est décidé, il va tout quitter et embrasser son rêve de toujours : partir plein Sud à la rencontre de la vie sauvage. Armé de son seul courage, de sa jeunesse, d'une loupe et d'une presse botanique, il parcourra ainsi des centaines de kilomètres, à pied de l'Indiana à la Floride. Imaginez une nature sauvage presque inviolée, où seuls rôdent quelques dangereux soldats du Sud en déshérence et d'anciens esclaves jetés hors des anciennes plantations...



Pourquoi ce livre ? C’est une excellente question, quand on sait l’accueil réservé récemment à Dans la forêt, l’adaptation d’un roman par Lomig. Je n’étais pas emballée par l’histoire mais j’aimais l’ambiance, notamment grâce au trait épuré, alors j’ai souhaité laisser une seconde chance à cet auteur illustrateur.

Au cœur de la solitude m’a davantage plu, même si ce n’est pas encore l’apothéose. De manière tout à fait intimiste, on découvre la vie de John Muir, un homme singulier dans une société en expansion, à l’aube du capitalisme. C’est un récit sans prétention, du moins en apparence puisqu’au gré des rencontres et des péripéties, ce voyage énumère les travers de la nouvelle société et offre des pans de réflexion entre tradition et modernité. La nature qui soigne, la mécanique qui blesse, et tous les dangers et inégalités que la vie doit traverser.

Si je fus transcendée par la quête d’identité et la soif de connaissances de John, je n’ai pas su m’enticher de lui. Son histoire est palpitante mais je trouve que les paysages et sa quête outrepassent son individualité. Résultat, j’étais toujours plus désireuse de voyager dans cette Amérique mais c’est avec un attachement poli que j’ai parcouru les planches.

Le style graphique est toujours aussi épuré et c’est très agréable d’observer le panorama des paysages et le détail du coup de crayon. Cela dit, je déplore que certains visages ressemblent trop à ceux de Dans la forêt, comme si l’artiste ne parvenait pas à se renouveler. Ce fut notamment choquant avec la tante, blonde, qui m’a rappelé une des deux soeurs.



Le style est toujours aussi beau, l’intrigue est plus intéressante, seul le protagoniste ne m’a pas convenu, trop en arrière-plan par rapport à son voyage. Au cœur de la solitude offre un agréable moment de lecture pour un périple serein, en dehors de quelques embûches. Je suis contente d’avoir donné une seconde chance à cet artiste, cela en valait la peine !



15/20


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