Dans une lettre laissée à sa fille
après sa mort, Yukiko, une survivante de la bombe atomique, évoque les épisodes
de son enfance et de son adolescence auprès de ses parents, d'abord à Tokyo
puis à Nagasaki. Elle reconstitue le puzzle d'une vie familiale marquée par les
mensonges d'un père qui l'ont poussée à commettre un meurtre.
Obéissant à une mécanique implacable qui mêle vie et
Histoire, ce court premier roman marie le lourd parfum des camélias (tsubaki) à
celui du cyanure. Sans céder au cynisme et avec un soupçon de bouddhisme, il
rappelle douloureusement que nul n'échappe à son destin.
Mon
avis :
Ce fut par un heureux hasard que je
tombai sur cette saga japonaise ; c’est en effet grâce à une
documentaliste, qui m’a décrit ces livres avec tellement d’engouement que j’ai
succombé pour eux. Moi qui voulais ne prendre que trois livres à la
bibliothèque, j’en étais au moins à six à ce moment-là !
Je suis tout simplement tombée sous
le charme.
Une fois n’est pas coutume, je vais
débuter cette chronique en évoquant le style de l’auteure. Elle amène son
histoire par une touche simple et le premier mot qui me vient à l’esprit en
pensant à son écriture est « poésie », voire sensualité. Pourtant, l’auteure
va droit au but et n’emprunte pas les détours et les lourdeurs que la langue
française arpente bien souvent, mais son écriture a touché la fibre sensible
qui se cache en moi, si bien que je suis moi-même étonnée de ne pas avoir eu un
coup de cœur pour ce livre.
Cet échec du coup de cœur provient
sûrement de l’histoire en elle-même. Elle est loin d’être mauvaise, et j’ai
même adoré la manière d’amener les souvenirs de la morte, par le biais d’une
longue lettre qui retrace toute sa vie et qui prend quasiment toute la place
dans la narration. Cette façon de narrer les souvenirs permet aussi d’accéder à
l’intimité d’une femme brisée par son enfance et ses actes et cela ne peut que
toucher un lectorat à la fibre sensible. De plus, les réactions de la fille qui
découvre tout un passé qui lui était caché jusque-là me paraissent très
réalistes et rendent ce personnage attachant.
Certaines scènes peuvent choquer les
plus jeunes lecteurs, vu ce que contient ce livre : descriptions sur la
guerre, quelques allusions au sexe, etc.
La fin est une véritable chute, un
gros dilemme pour le lecteur, puisque un nouveau personnage fait son apparition
dans les trois dernières lignes, juste avant que le texte ne s’arrête… et ne
nous laisse en plan, avec le reste à imaginer ! Une raison de détester ce
livre, donc, mais également de l’apprécier puisque l’auteure courrait le risque
de décevoir son lectorat en allant trop loin dans la narration. Personnellement,
malgré le déchirement face à l’incertitude qui s’ensuit, j’accepte et apprécie une
telle chute.
Dans une telle œuvre, qui relate les
secrets rédigés dans la lettre plus que la narration au premier degré, il
serait difficile de décrire les personnages encore vivants, même si, comme je
vous l’ai déjà précisé ci-dessus, ils sont attachants peur leur réalisme et
leur profondeur. En revanche, je peux évoquer les personnages présents dans la
lettre, en particulier Yukiko, la rédactrice de la missive, qui n’a franchement
guère eu de chance dans son enfance et a commis un acte impardonnable, qui
pourtant ne semble pas si injustifiable et immoral. De plus, sa complexité la
rend réaliste et attachante et c’est un réel plaisir que de lire ses mots,
porteurs de souvenirs.
Face à elle se tient Yukio, un jeune
homme qu’elle retrouvera plusieurs fois au cours de son enfance et envers qui
elle éprouve des sentiments de plus en plus forts à chaque rencontre. Celui-ci
est dépeint succinctement, on ne peut donc pas vraiment s’en faire une opinion
juste. Mais la bonté et la sensiblerie qui le caractérise le rendent attachant
lui aussi, et il émet la parfaite image du prince charmant.
Mais ce livre court évoque également
les horreurs de la guerre. Dans une société où la population s’efforce de
garder le silence sur les atrocités d’un événement dévastateur, Aki Shimazaki
dénonce les pensées des habitants, que ce soit pendant ou après la guerre et c’est
vraiment instructif pour les individus curieux de culture et d’histoire. De
plus, on en apprend davantage sur la société japonaise, notamment en ce qui
concerne les mariages arrangés ou non, et c’est là aussi instructif pour des
individus qui ne sont pas concernés par ces morales.
En
conclusion, un premier tome très intéressant, où la poésie des mots et des
souvenirs se mêlent à la cruauté des bombardements pendant la guerre et les
personnages complexes et attachants tendent à rendre l’ensemble de l’œuvre réaliste.
Et magnifique. Ce livre ne passe pas loin du coup de cœur.
Les autres titres de la saga :
1. Tsubaki
2. Hamaguri
3. Tsubame
4. Wasurenagusa
5. Hotaru
- saga terminée -
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