La Gaule, au début du cinquième siècle après Jésus-Christ.
Cerné par les barbares, minés par les intrigues internes et les jeux malsains du pouvoir, l'Empire romain, devenu chrétien depuis peu, décline lentement.
Dans une villa d'Aquitania, perdue au milieu des forêts, vit Thya, seize ans, fille du général romain Gnaeus Sertor. À cinq ans, elle a manifesté pour la première fois des dons de devin. Mais dans l'Empire chrétien, il ne fait plus bon être oracle, et à cause de ce secret qu'elle doit garder, Thya est devenue une adolescente solitaire, à l'avenir incertain.
Lors d'une des visites en Aquitania, Gnaeus tombe sous les coups d’assassins à la solde de son fils Aedon qui souhaite s'emparer de son siège au sénat. Il est ramené à la villa entre la vie et la mort et Thya cherche dans ses visions un moyen de le sauver. Son don lui permet d’apercevoir la forteresse de Brog, dans les montagnes du nord, là où, autrefois, Gnaeus a obtenu sa plus grande victoire contre les Vandales. Elle comprend alors qu'elle doit s’y rendre et s’enfuit dans la nuit.
Cela fait trois ans, depuis sa sortie pour tôt avouer, que je louche sur ce livre. J'ai finalement pu l'acheter aux Utopiales et, vous le voyez, il n'a pas perdu de temps dans ma PAL, sorti a peine deux semaines après l'achat. Si seulement c'était possible pour tous mes livres…
Pour faire court, ce premier tome nous présente une jeune fille aux capacités mystiques surprenantes. Le titre ne laisse aucune surprise quant à la nature de son don, pourtant certains moments sacrificiels et autres décorum qui font partie intégrante des dons d'une Oracle provoquent le dégoût, la surprise et autre émotion forte du même genre.
A la tentative d'assassinat de son père, un général aux valeurs morales passées, Thya va éprouver l'étrange besoin de partir vers Brog, une ville au nord du pays gaulois, alors qu'elle en voit les ruelles et les remparts dans ses cauchemars, ou plutôt ses visions. Poursuivie par les sbires d'un membre de sa famille, elle sera épaules par l'aide inattendue d'un maquilleur patenté et d'un ancien légionnaire.
J'en dévoile suffisamment pour m'arrêter là sur les détails.
Dans la forme, l'intrigue mêle un étrange équilibre entre action doucereuse et révélation fracassante. Si certains chapitres manquent d'action, le lecteur ne s'ennuie jamais pour autant et jubile au contraire quand vient l'action. Et c'était vraiment excellent !
En parallèle, si l'auteure maitrise parfaitement l'aspect fantastique avec les pouvoirs des Oracles, il en va de même avec l'aspect historique. En effet, Estelle Faye n'hésite pas à insérer des termes latins pour évoquer des objets ou bâtiments antiques bien précis, ce qui permet d'ancrer son récit dans une érudition bienvenue. Après tout, on ne crache jamais sur un réalisme travaillé et poussé, surtout dans une trilogie dédiée à la jeunesse. Dans la même idée, les différentes périodes sont décrites avec justesse, entre la splendeur passée de Rome et la décadence actuelle, avec les cieux qui s'encroutent dans leurs idéaux quand les jeunes s'affalent dans le luxe et la paresse. L'Antiquité est une période de notre Histoire que j'affectionne énormément et le travail de l'auteure fut remarquable, je le recommande à tous les amoureux autant que les novices, qui apprendront sans même s'en apercevoir !
Ma dernière parole quant au contenu sera pour la fin. Si la tactique finale était prévisible, ca n'a pas manqué de magie et les derniers mots donnent fortement envie de courir en librairie.
La fin est également le temps des révélations. Celles-ci ne peuvent se faire sans douleur et je fus réellement émue par ce qui arrive à Mettius. Dans un sens, il a obtenu le pardon et a réparé son mal par son acte courageux, mais apprendre ce qui s'est déroulé y'a vingt ans de cela ne fut pas indolore non plus.
En réfléchissant bien, y'a pas vraiment de fin a proprement parlé. Si on devine qu'on retrouvera les personnages pour une quête encore plus grande, on ne sait aucun détail sur la teneur de cette dernière, ce qui est à la fois frustrant et intrigant. Quoi qu'il en soit, j'en redemande !
Les personnages sont touchants, travaillés avec soin, et j'ai fini par m'attacher à eux.
Thya est une jeune femme pleine de ressources. Élevée a l'écart de Rome, en Aquitaine, son "exil" a permis qu'elle échappe aux valeurs de la nouvelle mode. Fière et courageuse, elle ne se laisse pas marcher sur les pieds même si cela a parfois contribué à mon agacement… eh oui, il arrive qu'elle fasse un peu trop ce qui lui plait par moment, idem dans les paroles, sans prendre attention au mal que l'ensemble peut engendrer. Heureusement, c'était des passages fort rares et j'ai apprécié la jeune dans l'ensemble.
Enoch est davantage dans la veine du beau gosse qui sait qu'il a du charme et qui n'hésite pas à s'en servir. Son enfance ne fut pas rose pour autant, et j'ai même éprouvé de la compassion pour sa situation délicate. On n'approuve pas tous ses actes mais sa fidélité finale rehausse sa position et la encore, on a hâte de savoir ce qu'il va devenir.
Mettius incarne les valeurs de la splendeur romaine passée : honneur et vertu sont ses maîtres mots, même s'il éprouvera de la honte maintes fois.
Je ne m'arrêterai pas sur chacun des personnages méchants. Je regrette seulement que leur cruauté effleure les stéréotypes du genre… J'aurai préféré une méchanceté plus diffuse, moins viscérale. Si cela a empêché l'approche du coup de cœur, je n'ai pas boudé mon plaisir pour autant !
Un dernier petit regret, on ne sait pas ce que devient la créature qui suit Thya, j'aurai voulu savoir !
Quant à la plume, elle fut magique. Précise et poétique, elle nous entraine en douceur dans les tréfonds de la Gaule antique. Les pages défilent vite, sans heurt, pour le bonheur des plus jeunes comme des plus matures.
Quelques détails peuvent tout de même choquer un trop jeune public et je ne le conseille pas en-dessous de quatorze ans…
Pour finir, il serait indigne de ne pas parler de la couverture tour simplement sublime. Scrinéo m'avait habituée à des illustrations sublimes (notamment pour les publications d'Aurélie Wellenstein) et je ne fus là encore pas déçue, entre le mélange des couleurs et des formes qu'on devine dans la coiffe de Thya.
Ce fut une lecture magique (autant que la couverture) qui échappe de peu au coup de cœur tant attendu. Le lecteur passe un excellent moment entre fantastique mystique et histoire antique et j'avoue avoir savouré la moindre page de cette plume onirique et envoûtante. Je recommande ce premier tome à tous. Quant a moi, faut que je me procure la suite au plus vite !
17/20
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