22 juil. 2024

Alliances




Sur une Terre dont le climat a radicalement changé suite à l’emballement du réchauffement climatique, des oasis et des microclimats locaux ont permis à la vie de s’abriter, voire de se développer.
Mais quelle place pour l’homme dans un tel écosystème, face à l’émergence probable d’une nouvelle espèce dominante sur la planète ? Il pourrait y avoir des alliances inédites à passer.
Tikaani, l’Inuit, parti d’Islande à bord d’un avion solaire, Ophélie, la guérisseuse tapie dans sa jungle au Canada, Denn et Nao, qui ont quitté leur tribu cavernicole du désert qu’est devenue la Californie : tous sont à la recherche de survivants, certains rêvent de redonner sa place à l’humanité. Mais ils vont apprendre que ce qui reste des hommes peut encore nuire à la planète...



Pourquoi ce livre ? C’est le premier roman de Jean-Marc Ligny que je découvre, alors qu’il est fort réputé dans le champ de la science-fiction écologique. Ce sera donc à l’occasion d’un Book club sur une pépite méconnue que j’ai entamé la découverte de sa bibliographie – et je ne suis pas sûre de m’arrêter en si bon chemin. Vous allez très vite comprendre pourquoi.

Ça partait pourtant mal. Lisant les textes à partir de la page des titres, je me suis aperçue que ce one shot est en réalité l’aboutissement de trois précédents romans, qui peuvent tous se lire indépendamment. Malgré l’insistance sur le fait qu’on retrouve trois personnages du précédent opus sans que cela perturbe notre lecture et notre compréhension de l’intrigue, je craignais d’être déçue par le fait de passer à côté de quelque chose. Loin de me décevoir, la relation entre les trois personnages en question et la valeur de ce qu’ils apportent à cette histoire m’ont au contraire donné l’envie de découvrir Semences (et qui sait, peut-être vais-je remonter le chemin en sens inverse jusqu’à la première histoire). Sachez donc que c’est effectivement indépendant, la compréhension de cet univers n’étant pas entachée par le manque de connaissances sur les faits produits dans le passé.

J’ai beaucoup aimé la construction temporelle de ce roman. Chaque personnage, qui sont deux principaux, évolue dans une sorte de temporalité différente et les ellipses sont plus ou moins importantes selon l’intérêt de chacun pour ainsi les faire aboutir au même présent. Ca n’a pas dû être évident pour l’auteur de situer les événements de chacun d’eux, on le ressent d’ailleurs pour Tikaani pour qui le temps est plus dilué, plus vague dans sa notion. Loin de me perturber, j’ai trouvé ce choix intéressant, d’autant plus que cela n’alourdit en rien le texte.

Alliances est une histoire post-apocalyptique située à plusieurs siècles derrière l’effondrement écologique. La crise du nucléaire et du pétrole a ravagé le décor, entraînant famine, rendant les terrains hostiles, etc. Quelques noyaux de population survivent, chacun de manière différente et en bonne intelligence. Sauf une communauté, qui entretient un Monstre que personne ne souhaite voir ressusciter…

Pendant la première moitié, j’ai eu du mal à comprendre vers quoi on allait, si on obtiendrait un rebondissement ou si ce serait une intrigue plus contemplative avec la « simple » déchéance de notre humanité. Cette impression est d’autant plus renforcée que les chapitres sont longs, s’attardant sur des points ou des détails qui nous paraissent peu importants. Finalement, entre vie en autarcie à l’écoute de Mère Nature ou vol en avion brinquebalant pour découvrir l’ailleurs, les deux intrigues qui évoluent en parallèle furent toutes les deux passionnantes à lire, et ce jusqu’à la croisée des chemins ! Les chapitres concernant Ophélie ont obtenu ma préférence, de peu, par cette vision et cette acceptation originale de la nature, de ce qu’elle abrite.
A cela vient s’ajouter l’intrigue de trois personnages : Denn, Nao et Marali, qui apportent des éléments nouveaux créant une intrigue plus ficelée, avec un réel objectif derrière. J’ai tout de suite été happée par leur passée et leur but final (l’objectif que se donne finalement Nao étant trop prévisible à mes yeux, mais ce n’est qu’un détail dans la richesse de cette histoire).

Contrairement à tout le reste du roman, qui prend son temps, la fin est très précipitée, sans aucun épilogue pour les personnages toujours debout. Là encore j’ai aimé ce choix mais je ne peux m’empêcher d’être choquée ! Qu’est-ce qu’il advient de chacun d’eux, et du reste de la population de cette ville au nom imprononçable ?! Tout ceci me donne le sentiment (et l’espoir ?) qu’il pourrait y avoir une suite, même si cela m’étonnerait.

Presque malgré moi, j’ai adoré les personnages. Je pense que c’est avant tout pour eux que l’intrigue louvoie et prend son temps : c’est pour bien s’imprégner de leur personnalité et du but qui leur est donné dans la vie. Tikaani doit surveiller, voyager, découvrir et récolter des informations ; l’autre doit connaître la violence pour mieux renaître au sein de Mère-Nature. Les personnages sont bien amenés, dépeints avec justesse, et c’est pour ça que j’ai aimé suivre leur voyage dans ce décor apocalyptique.
Denn, Nao et Marali ne sont pas en reste. Par leur jeunesse et leur passion, ils apportent un élan d’espoir et surtout une panoplie d’émotions…

… car je trouve que c’est le gros point faible de ce roman, finalement. Le style d’écriture de l’auteur se lit parfaitement bien, d’une légèreté inhabituelle pour un tel récit. Toutefois l’ensemble manque d’âme et d’émotions, me donnant le sentiment que tout est lisse sur une bonne moitié du roman, comme si Jean-Marc Ligny nous proposait un compte rendu plus qu’un roman tel que je le conçois. Heureusement ce choix ne m’a empêchée d’apprécier les personnages et de m’imprégner de l’ensemble.



Entre l’annonce que c’est le quatrième roman, certes indépendant, dans cet univers et le manque d’émotions transmis par la plume, le début fut assez difficile sans pour autant envisager un abandon. Tout se libère une fois les premiers chapitres lus et j’ai pu pleinement apprécier ma lecture. Les personnages sont forts, et le fait qu’ils soient si peu nombreux permet de les approfondir, les rendant justes, en adéquation avec leur milieu et leurs actes. L’intrigue prend son temps, c’est pourtant une fin retentissante qui vient clore ce nouveau chapitre dans cet univers d’effondrement écologique. Je ne me suis pas ennuyée une seconde et j’ai maintenant très envie de lire le tome qui précède celui-ci pour en savoir plus sur les personnages concernés !



15/20


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