14 mai 2019

Bertram le baladin




"L'auberge se tenait au croisement des deux routes les plus fréquentées de la région. C'était une bâtisse basse et longue, dont le toit était enfoncé en son milieu, comme si un géant était venu s'asseoir dessus." Il y avait un temps où l'on savait écrire, et surtout où l'on savait créer le plus miraculeux des matériaux : le papier. Cependant, le secret de sa fabrication s'est depuis longtemps perdu. Désormais, des centaines de Musiciens parcourent les Terres Hautes, indifférents aux limites des domaines et des fiefs, pour récolter des histoires. Bertram le Baladin, célèbre Musicien de la Guilde, a perdu son luth - ou plutôt, on le lui a dérobé. Bien décidé à le retrouver, il est contraint de s'associer avec une femme, Sans-Nom, témoin du larcin. C'est ainsi que l'étrange duo part en quête du luth, dans un monde où la magie réside dans toutes les histoires : ragots, chansons ou Iégendes.



Pourquoi ce livre ? C’est lors d’une sortie sur Rue des livres, salon littéraire sur Rennes, que j’ai fait la connaissance de Camille et de son oeuvre. Une connaissance de la promo de Master me l’a fortement recommandée, il a suffi de ce seul petit coup de pouce pour l’ajouter à ma PAL. Par chance, il n’aura stagné qu’un an sur mes étagères, curieuse de le découvrir au plus vite (et quand tu te rends compte qu’un an, c’est vite pour moi, tu te demandes quel âge ont les plus vieux livre de ma pile !).

Bertram le baladin est un récit surprenant. Remisez la fantasy épique et les quêtes initiatiques au placard ou aux oubliettes : ce one shot de moins de trois cent pages vous fera voyager sur les routes incertaines et des sentiers cachés pour… un luth. Eh oui, car Bertram est ménestrel, musicien rattaché à la Guilde - qu’il s’échine d’ailleurs à éviter. Or, il s’est endormi par une belle nuit contre un tronc d’arbre, épuisé par sa route, et il se réveille sans son instrument. Il part alors en quête de son trésor, rencontrant de ce fait des personnages mystérieux ou des bandes de mercenaires.

Ce qui est certain, c’est que le rythme nous tient en haleine tout du long. Les péripéties s’enchaînent sans que nous ne puissions prédire la fin, de sorte que l’on reste scotchés de A à Z par cette lecture. J’ai franchement adoré découvrir les rebondissements au fur et à mesure qu’ils s’implantent dans la trame. De plus, je n’avais pas vu venir un des twists finaux - chose devenue rare - renforçant plus encore ma satisfaction.
La fin est peut-être un tantinet trop rapide. C’est un sentiment d’ailleurs que je déplore pour l’ensemble de l’intrigue. Certes, le rythme fut un bon atout dans cette intrigue et j’ai perçu l’amusement de l’auteur à écrire cette histoire. Pour autant, j’aurai voulu qu’il s’étale davantage dans certaines résolutions, même si certaines scènes sont mises en avant par, justement, leur durée dans le nombre de pages.
Satisfaite mais frustrée, c’est ce sentiment contradictoire qui me prend à la sortie de cette lecture.

Derrière cette extravagance, des thèmes forts cachent un récit plus affirmé et engagé, comme celui de la place de la femme dans les différents domaines de la société ou encore l’usage et l’importance des instruments de musique et de la culture, et plus globalement des arts, dans notre quotidien.

J’ai adoré les personnages. Sans être parodique, ils dépeignent chacun les grands traits des célèbres héros d’autres fresques héroïques ou fantaisistes, ils furent rafraîchissants et attachants.
L’innocence de Bertram l’ont rendu très vite sympathiques. Sans aller jusqu’à l’attachement, il dégage une détermination et un courage qui lui font dépasser son simple statut de ménestrel. Il est frais et fringant malgré ses déboires. Bref, je l’aime bien !
Il en va de même pour Sans-Nom, cette héroïne mystérieuse qui lui tombe dessus malgré lui. Mystérieuse, elle ne le reste pas bien longtemps, délivrant son passé comme un soulagement. Malgré cela, elle garde cet air bourru, sombre, qui la caractérisait dès le départ, même si quelques éclats de rire viennent nous surprendre.
Je n’ai pas aimé Chicots, ce profiteur opportuniste, autant que les seigneurs, père et fille. S’ils donnent le change à une intrigue “limitée”, leur caractère est bien entendu exécrable et j’étais contente de voir le sort final.

La plume renforce ce sentiment d’efficacité. Légère et directe, elle enchaîne les phrases courtes et rythmées, faisant de ce récit une petite lecture bien sympathique sur tous les points.



Je ne m’attendais pas à cela, mais ce fut une surprise des plus agréables ! L’intrigue sort du lot en mêlant avec brio légèreté et sérieux, tandis que les personnages voguent sur le vent de l’incertitude, menés par le bois du luth. De péripéties en déboires, une intrigue extravagante et efficace voit le jour, nous menant vers des contrées appétissantes. En bref, une excellente lecture, sans prise de tête, que je recommande dès le plus jeune âge.



16/20




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