4 janv. 2019

Les Questions dangereuses




1637 : Qui a assassiné le docteur Lacanne, en plein château de Déversailles ? Pour connaître la réponse à cette question, le mancequetaire Thésard de la Meulière, son libram à la main, est prêt à résoudre les énigmes les plus perfides... jusqu’aux confins de l’indicible.



Un grand merci à Samantha des éditions ActuSF pour ce partenariat hors du temps !

Pourquoi ce livre ? Davoust ! Quand on connaît la verve de l’auteur, son humour comme ses idées, on ne peut que avoir l’envie de découvrir tous ses bouquins ! Mon premier essai consistait en la réécriture de la matière de Bretagne, inclus dans le recueil 2017 des Utopiales. Depuis, je compte bien lire tout ce qui a déjà été produit ! En attendant, j’ai avalé en l’espace de deux heures son petit dernier : Les Questions dangereuses.

Ce livre se divise en deux parties bien distinctes. Cette découverte a d’ailleurs créé ma surprise, je pensais lire un court roman et je me suis finalement retrouvée avec deux morceaux totalement différents au sein de ce même ouvrage. La déconvenue passée, je dois reconnaître que c’était bien mieux ainsi.

D’un côté, on découvre la novella - c’est l’auteur lui-même qui m’a appris ce qu’était ce format, entre la nouvelle et le roman, et c’est pas peu dire. Les mancequetaires, ou les mousquetaires revisités à la sauce Davoust, quel délice ! Je ne suis pas particulièrement fan du Dumas - comme Lionel, si j’ai bien compris (en voilà une qui ne le lynchera pas sur la place publique) - pourtant la patte littéraire des romans de capes et d’épées est clairement perceptible à qui détient un début de culture générale. J’ai ressenti un profond coup de cœur pour l’originalité des Questions et Réponses. Si je ne détiens clairement pas la science infuse, j’ai assimilé cela aux duels de nobles pour régler un litige et j’ai interprété la chose comme une volonté de l’auteur de montrer à quel point les mots peuvent être des armes qui blessent et infligent des dégâts, parfois irréversibles. Je vais loin dans mon délire mais j’assure complètement ma pensée ! Autrement, ce livre relate une “banale” affaire de meurtres. Les guillemets sont vaillamment indiqués pour montrer que l’intérêt est vraiment ailleurs, pas sur le fond mais sur la forme. Je pense qu’il faut en avoir conscience lors de la lecture. Après, rien n’empêche de prendre plaisir à parcourir les pages, bien au contraire.
Les personnages ne m’ont pas particulièrement marqué mais c’est davantage un problème lié au format, qui induit un développement restreint. Difficile de rendre attachants des personnages sans avoir la possibilité de leur une profondeur comme il se doit. L’auteur s’en sort néanmoins très bien, chacun a son background et on devine aisément le caractère de chacun selon son rôle dans l’intrigue. Par ailleurs les personnages ne sont pas foule, le regard se braque sur les plus importants, ce qui empêche tout rebondissement. Toutefois le propos n’est pas là et, sur un livre comptant plus ou moins soixante dix pages, ce n’est pas vraiment gênant.
La fin de cette partie est tout bonnement excellente. Légèrement amoindrie par le “spoil” du titre de chapitre, la toute dernière phrase est pleine de promesses… Pour résumer mon ressenti quant à cette novella, je n’ai qu’une envie : lire un roman dans cet univers. Enfin, je devine que ce doit être compliqué vu la répartie et le nombre de Questions qu’il faut imaginer (mais le rêve fait autant vivre que l’espoir).

La seconde partie de ce roman, étendu sur un peu plus de quarante pages, rapporte une conversation entre l’auteur et Nicolas Barret, intervieweur de talent - j’ai conscience de donner l’impression d’en faire trop mais ses questions étaient si bien introduites qu’on ressentait aisément son intérêt pour l’oeuvre, et non pas seulement une interview de façade pour combler les blancs.

Cette conversation a permis d’éclairer certains points sur la volonté de Lionel Davoust dans son intrigue mais également sur sa perception du métier d’auteur. Et quand on a déjà rencontré le personnage et qu’on se rappelle son bagou, on ne peut que s’amuser à lire ses petites piques et autres traits d’esprit, comme ses “blagues pourries” comme il se plaît à les qualifier (j’avoue avoir rigolé sur le “mal armé”, et avoir subi le regard perplexe voire blasé de mon compagnon quand je lui ai lu la phrase). Au final, l’interview se lit aussi bien que la novella elle-même, de sorte à ce que le contenu des deux parties se valent sans souci. Et là encore, on en voudrait plus ! L’auteur comme l’intervieweur se remercient à la fin, à mon tour de leur dire merci pour ce moment fort sympathique !

Et enfin, encore une mention spéciale pour la couverture, qui retranscrit fortement bien l'ambiance des romans de capes et d'épées !



Une fois la surprise de découvrir deux parties opposées en un seul petit livre, j’ai pris mon pied du début à la fin ! Entre une novella rythmée, sans tension majeure mais avec un réel intérêt littéraire et linguistique, et une interview riche d’intérêts, d’explications et d’humour, on passe un agréable moment en compagnie de l’auteur et ses personnages. Mon seul regret porte sur l’épaisseur du livre, bien trop maigre à mon goût. J’en voulais plus encore (j’assume ma gourmandise) et j’espère voir un joindre poindre le bout d’un dos d’une suite ! En attendant, je le conseille à tous car ce bouquin se dévore réellement sans peine !



17/20




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